vendredi 17 décembre 2010
RESTER COMME ÇA, TRISTE, C’EST PAS BIEN!
Je ne devais pas écrire cette semaine, je ne sentais rien d’inspirant. Mais il arrive des petits moments qui donnent de la couleur au quotidien. C’est pas grand-chose mais je vous le raconte.
Je suis rentré de la commune vers midi. Là-bas, c’est un peu tranquille; la grande partie de mon travail est déjà passé avec eux. J’étais donc à la maison, à ramasser la saleté sur le terrain avec Bolé, un petit voisin (petit de vingt-sept ans). Après le travail, j’étais assis sur ma véranda, un peu gelé par le soleil et le temps qui passe. Ma voisine Djabou, me voyant là depuis un bout m’a dit alors : « Serge, tu fais quoi, assis comme ça avec la tristesse. »
-« Je ne suis pas triste, je me repose. »
-« Non, tu es triste. Rester comme ça à être triste, ce n’est pas bien. »
J’ai dit non, mais elle avait un peu raison. J’étais dans un petit moment de tristesse, et comme tout se lit sur mon visage…
Après cela, j’ai envoyé Bolé chez une voisine qui avait préparé le vin. Au dire de Bolé, ce vin dépasse la CASTEL (la Molson du Cameroun). Bolé est venu avec un sceau de vin de 300francs (75cents), et on a bu ça avec Djabou et les autres. Comme Djabou avait fait griller le coq, j’ai mangé avec eux, sans cérémonie.
Comme vous voyez, mes moments de tristesse ne sont jamais bien longs. Mais je vais vous dire, il faut écouter Djabou : rester assis là avec sa tristesse, ce n’est pas bon!
P.S. Moi et Sylvain sommes allés avec Jacqueline et ses enfants samedi dernier cueillir le coton dans leur champ. C’est la seconde année que j’y vais : toujours aussi plaisant avec eux!
vendredi 10 décembre 2010
COULEURS D'AUTOMNE
SŒURS AU GRAND CŒUR
Hier à la commune, c’était jour du budget 2011 à voter. En attendant le préfet du département, dont l’heure d’arrivée était déjà passée « depuis », j’étais sur le banc de la véranda de la mairie. Je jasais avec une petite sœur de la mission catholique, venue assister à l’invitation du maire. Je lui ai posé des questions sur son travail, et ça m’a épaté. J’ai peut-être écrit quelques lignes sur ce sujet précédemment, mais c’est pas grave… à quelques jours de Noēl, c’est toujours bon!
Les Sœurs de la Charité sont à Moutourwa depuis plus de vingt ans. Elles ont commencé leurs œuvres, habitant dans des boucarous, au petit village de Tahaī, pour s’installer ensuite plus confortablement à Moutourwa il y a quinze ans.
Elles gèrent principalement un centre pour les enfants en sous poids. Les petits sont amenés dans le centre avec la mère, et y demeurent un mois ou deux, le temps de reprendre un poids plus normal, et le temps d’apprendre à la mère une façon de cuisiner des plats fortifiants. Il y a de la place pour une douzaine d’enfants avec les mamans, et c’est souvent plein. Quelquefois malheureusement, les petits arrivent trop tard et meurent au centre. On en a perdu plus de 12 depuis le début de l’année.
Ce sous poids, il s’explique un peu par la pauvreté, un peu par la négligence, un peu par l’ignorance. La vie pour une famille en brousse est souvent très difficile, et si le dernier d’une famille de sept ou huit n’a pas une santé de base solide, on n’a pas toujours le temps et les moyens pour l’aider.
En plus de ce centre, les sœurs partent régulièrement dans vingt villages pour des cliniques de pesée : on y pèse les enfants, on donne des conseils et des suppléments vitaminiques. Pour les cas les plus graves, on essaie de convaincre la famille pour un séjour au centre. Plus de 1125 enfants sont inscrits à ce programme et sont visités une fois par mois. Ça me dépasse! Comment deux petites sœurs, avec quelques animateurs, peuvent opérer un tel projet, avec des moyens assez modestes. Le plus fantastique, c’est que malgré les difficultés, malgré l’impression que la situation ne change que lentement ou pas du tout, cette petite sœur reste optimiste. Sa communauté construira bientôt un hôpital pédiatrique à Moutourwa, que desservira tout le grand nord camerounais.
C’est sûrement la foi qui les porte. Je lève mon chapeau à ces femmes au grand cœur.
P.S. Je salue en passant mon amie Maria, de Natal, Brésil. Elle faisait, ou fait peut-être encore un projet similaire là-bas
Crédit photos: www.stphoto.qc.ca
jeudi 2 décembre 2010
MIDJIGUIDU TREMBLAY Tremblay, ma voisine
À quelques mois du départ, j’ai commencé la lecture du 5ème tome des chroniques du plateau Mont-Royal, «Le premier quartier de la lune. » En gros, c’est une journée dans la vie du fils de la grosse femme et de son cousin Marcel. Ce Marcel se perd tranquillement dans sa tête et il s’en dégage une grande tristesse. Ça me rappelle mon neveu adoré Jérémie qui parfois lutte pour rester la tête hors de l’eau.
Un moment avec ma voisine du quartier m’est aussi revenue en mémoire dans un passage où Marcel se sent « vidé ».
J’allais au carrefour hier. En passant devant sa concession, voisine était assise au milieu de la cour (je vous rappelle qu’ici, on vit plus dehors que dans les boucarous de 6m² : la cour est le « living »). Je passe donc et je la vois, seule, avec une fatigue et une tristesse dans les yeux. Depuis le début de sa grossesse, je constate que ça semble lui peser : son gros ventre, ses quatre ou cinq encore petits, le mari et tout le tralala. En passant je la salue et lui demande : « Ki gir le kwa? » (Toi fatiguée est-ce que?) Un regard triste et la réponse : « Nhi Serge. I gir le. » (Oui Serge, je suis fatiguée). « Sise! » (Courage!) a été mon seul réconfort.
La fatigue ou la tristesse, ça frappe tout le monde. Pour une seconde, pour une journée ou pour un long, long moment de la vie. Et si on la voit, la fatigue ou la tristesse de l’autre, ça ébranle toujours un peu…
crédit photo : Sylvie www.stphoto.qc.ca
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