mercredi 24 mars 2010

IL EST SORTI!!!


Regardez comme il est mignon! Il est sorti comme ça, un beau jour de février, tout vert et prêt à être exploré… Je vous parle du recueil de contes Guiziga. C’est en juillet dernier que l’on avait commencé cette aventure (voir vieille chronique de l’été dernier), avec des jeunes et des vieux de la région. On a même eu la collaboration d’enfants de Blainville, au Québec. On appelle ça la mondialisation…

Le petit donc est là, grâce à la commande initiale de l’inspecteur des 45 écoles primaires de Moutourwa. Bientôt, le président de l’association culturelle Guiziga du Cameroun fera imprimer une quantité pour le congrès d’avril à Maroua, et je compte bien trouver un partenaire pour fournir des copies aux moniteurs qui dispensent des cours d’alphabétisation par la langue maternelle dans une trentaine de villages. On dit que ce type d’alphabétisation est le meilleur pour « switcher » au français et avoir avec cette dernière langue du succès.

Comme j’ai de la difficulté à voir petit, je compte en plus trouver le moyen de faire une tournée dans les villages guizigas du grand nord. Ce projet serait réalisé par des étudiants, toujours pour diffuser la bonne nouvelle de la lecture.

Après, on va laisser la chose voler de ses propres ailes. Peut-être pourra-t-elle donner d’autres petits…
(…)
…Les lignes supérieures sont d’hier. Aujourd’hui, je suis passé chez Pasteur Yonki, le traducteur guiziga. Arrivé vers 17h30 pour des petites corrections en vue de la seconde impression, c’est à 20h30 que je suis rentré. Moi qui pensais le tout parfait, ça m’a un peu angoissé. Là, j’ai texté Pauline pour qu’elle me tire un animal de son paquet de cartes amérindien. Après cinq minutes, je reçois la réponse : elle m’a pigé le « cygne », qui symbolise la sérénité. Je dois faire confiance et prendre de grandes respirations. Après tout, on finira ça demain, y’a toujours un peu de temps ici…

LES VOLONTAIRES AMIS





Je leur ai rarement fait allusion, ou de façon isolée. Nous sommes plus de trente volontaires dans la région de l’Extrême-nord, ils me sont précieux. La majorité travaille en éducation, soutenant les équipes scolaires et les groupes de parents. Ils prônent bien fort la scolarisation des jeunes filles. D’autres oeuvrent avec des ONG locaux ou avec des communes (comme moi) dans le « renforcement des capacités » des acteurs de ces groupes. Je vous épargne les termes du monde du développement (thèmes transversaux et autres fantaisies du genre), en vous assurant que mes camarades essaient avec les gens d’ici d’améliorer ce qui tourne un peu parfois beaucoup «carré».

On se rencontre quand on va à Maroua, dans des réunions, ou juste comme ça, pour aller prendre un verre sur Domayo (là où ça bouge dans l’Extrême…). Je me suis lié avec certains plus que d’autres : les choses normales de la vie.
Parfois, on s’organise des sorties de groupe. C’était le cas ce weekend; je recevais à Moutourwa, avec ma collègue du village Ruth, une douzaine de volontaires pour un deux jours « Montagnes et party ». Le samedi avait prévu un coucher de soleil romantique au Mont Mesengel, mais le vent du désert, l’armatan, nous avait englouti sous un brouillard de poussière, ce qui n’a quans même pas manqué de charme. Après, on s’est retrouvé au bar de Djidja, pour un bon repas et une grosse heure de danse. Je me suis fait aller…
Dimanche, on s’est tapé le Muwa Merked, un massif de six petites montagnes. Après avoir rejoint la grande croix au sommet, en partant du centre de Moutourwa, c’est une randonnée sur les sommets qui nous a amené à Tahaī, un petit village lové sur l’autre versant. Mon ami Bouba nous as reçu dans la concession familiale : on y a bu l’eau et le Bil-Bil (la bière de mil).
On s’est tous séparé peu après très contents, mais aussi très fatigués. Les montagnes de roches dans un air sableux (l’armatan souffle depuis quatre jours), ça nous a bouffé de l’énergie. Mais comme on dit quand on est content : c’est une bonne fatigue!

jeudi 11 mars 2010

UN AN DEPUIS…(3/3)*


*Je met le 3/3 pour attirer votre attention sur le fait que j'ai téléchargé 3 articles ce même jour.
Il y a un an, j’entreprenais une belle aventure en terre camerounaise. Je suis toujours dans l’Extrême-nord de ce pays, avec les gens de mon beau village, Moutourwa. Le temps a filé plus que je ne l’avais imaginé. Je n’ai que de bons souvenirs, pratiquement pas de pépins.
Quand on est à mi parcours, je suppose que ça demande un bilan... Essayons pour voir en cinq mots : NASARA, CONTES, FORCE, PARTIR, MERCI.
• Des premiers temps où l’on m’interpellait « Nasara », on est passé à mon prénom. Serge est connu par tout le village, bien que moi, je sois souvent mélangé quant aux visages et aux prénoms. Le blanc que je représente est toujours celui qui a la chance et qui a beaucoup reçu, comparé à l’africain : le blanc a l’argent et le pouvoir, il est intelligent et peut influencer. Si par exemple une association a des contacts avec un « nasara », il n’y aura pas de problème.
• Un temps peut-être plus fort que mon travail à la commune aura été la confection de contes guiziga, en collaboration avec une pléiade d’enfants d’ici et d’ailleurs. La première édition est sortie le mois dernier. C’est vraiment bien!
• Suis-je naīf ou quoi, mais je trouve les gens d’ici bien forts. Forts physiquement d’abord : voir une femme revenir de la brousse à pied, avec sur la tête l’équivalent de quatre grosses brassées de bois, et l’enfant au dos en plus, faut le faire. Forts ensuite moralement : le malheur peut frapper souvent mais on essaie toujours de rester orienté vers la survie, on tente de visualiser l’espoir dans le brouillard. Les blagues tournent souvent autour de la misère des africains. C’est vrai que la misère est là, mais on a choisi d’en rire un peu…
• J’ai mis le mot partir je ne sais trop pourquoi. Partir quand je viens de faire le tour des saisons camerounaises. Pourquoi partir quand les gens me disent toujours que je deviens un des leurs. En fait, durant la seconde année, j’essaierai peut-être de partir encore plus loin dans l’univers des gens qui m’ont accueilli. Partir vers là-bas m’amènera je sais vers le dedans de moi! (Wow! Ça, ça vient de mon fond! Hein Michelle?)
• En terminant cet article, je tiens à vous remercier personnellement. Vous qui me lisez, ça me soutient. Vous qui êtes inscrit comme membre, vous avez touché mon cœur. À ceux qui laissent des commentaires, je vous fais la bise. (Si vous ne voulez pas de bise, ça va : n’arrêtez pas d’écrire.
• À tous les autres qui pensez à moi, merci de ce soutien.
Enfin si vous êtes d’accord, on continue ensemble la route au Cameroun…

DIRECTION OUEST(2/3)



Branlement de combat début février dans les bureaux de mon ONG à Yaoundé: on désire organiser une rencontre entre tous les volontaires qui oeuvrent dans le programme « Participation et gouvernance ». La date est fixée vers le 20 du même mois, et le lieux choisi est la capitale de la région Nord-ouest, Bamenda et ses alentours. Le maire de Moutourwa m’accompagne. Nous sommes près de 20 participants du grand nord qui faisons le long voyage : sept heures de bus jusqu’à Ngaoundéré; dix-sept heures de train jusqu’à Yaoundé, et enfin six autres heures de bus pour atteindre Bamenda. Le voyage se passe bien : mon maire fait l’animation dans le car et supplie à tout moment le conducteur de faire halte pour permettre à tous d’uriner un peu…
Le Nord-ouest est favorisée par un climat frais, des pluies abondantes et des terres fertiles. C’est également l’une des deux régions anglophones au Cameroun. Les huit autres sont francophones… C’est comme l’inverse de la situation linguistique canadienne.
On a donc passé trois jours avec les maires du nord et du Nord-ouest, à visiter des institutions, à entendre parler de gestion communale, et à essayer de comprendre l’anglais de ce coin, qui est souvent mélangé avec le « pilgin anglais »(mixte anglais-patois, et je ne sais trop!). Les maires sont partis le mercredi soir, et on s’est tapé deux autres jours de blabla entre volontaires.
Après, je suis resté dans la région pour visiter un peu. Le samedi, je suis monté sur les hauts plateaux, où j’ai visité une immense plantation de thé. Un travailleur indien et sa femme m’ont gâté de nourriture de leur pays; c’était un peu étrange de manger en écoutant des vidéos de Bollywood (le Hollywood de l’Inde). Je ne peux passer sous silence les merveilleux chips à la banane plantin, frits sous mes yeux, et tellement bons!
Le dimanche, je suis redescendu dans la vallée, vers Bello. Quarante-cinq minutes en moto sur une pente raide et en serpentin. J’ai découvert des paysages à couper le souffle et j’ai admiré la force des freins de là-bas. À destination, j’ai retrouvé une collègue. Avec un de ses amis, on a fait une randonnée « chute et ruisseau ». Rafraîchissant!
Les jours suivants m’ont trouvé à Yaoundé. L’appel de Moutourwa s’est alors fait entendre, et j’ai embarqué dans le Tchoutchou du nord…

LE BLANC DANS L’EAU (1/3)


Peut-être les gens d’ici ne seraient pas contents de voir ce titre…ou plutôt si! Laissez-moi vous conter comment un quartier remet en marche un forage (puits)…
En panne depuis un mois, et avec la saison sèche qui arrive, je m’inquiétais du forage en panne que j’aperçois au loin de ma douche derrière ma maison. Un soir, je demande à mon ami Isaac « qui » est le président de notre point d’eau. On est tout près de sa demeure, on s’arrête lui jaser un peu :
-M. le Président, on va faire comment avec le forage en panne?
-Les gens n’ont pas l’argent pour faire réparer. Il y aura l’argent à la récolte du MIL.
-On sait combien ça coûte pour réparer?
-Oui!
-Combien?
-Sais pas.
(Pourquoi oui alors? -C’était « oui sais pas! »)
Le lendemain à 7h le matin, le même président frappe à ma porte avec la pièce défectueuse. Il est avec le réparateur de puits de la commune. On convient de s’informer des prix…
À la commune, un collègue habitant « Bongolori », mon quartier, me dit que l’on va tenir réunion au forage, l’autre lendemain à 7h bien sûr(on est matinal ici!).
À 7h, je suis là avec une trentaine de voisins et ça jase. Comme c’est en patois, j’attrape quelques bribes et mon voisin Ernest me traduit l’essentiel. En trente minutes, on avait élu un nouveau conseil de gestion du puits, et il était décidé que j’allais à Mouda avec le président, s’informer auprès de la division « eau » de la fondation Bethléem, du meilleur prix pour les pièces manquantes.
Après cette visite et quelques tractations de coulisses, on se retrouve avec une facture de 125 000 Francs, au lieu des possibles 400 000 Francs pressentis au début. Le jour d’après, on m’informe que la pièce est installée, même si l’argent n’est pas là. On me dit que l’on va planifier une collecte dans le quartier. Je reste sceptique. J’ai fait mon don, mais je n’ai rien entendu depuis trois semaines quant à la suite. Je n’ai rien entendu, mais je vois que les gens puisent au forage, et cela, c’est un plus avec la saison sèche qui s’installe.
Comme message final à cette histoire, on peut dire que quand on demande quelque chose, ça peut donner. Quand on est un blanc, on peut dire aussi que ça donne un peu plus rapidement… Je ne dis pas ça parce que j’ai fait beaucoup pour ce problème, mais… mais parce que… Ah! Et puis on s’en reparle un autre jour!